Assistant, collaborateur, remplaçant Kiné libéral : quelles différences ? Et comment choisir ?
En France, contrairement aux autres pays Européens où l’exercice de la profession est majoritairement salariée, 85,88%* des masseurs-kinésithérapeutes inscrits au tableau de l’ordre sont libéraux. Plus d’un tiers de ces kinés libéraux (environ 25000) exercent sans être propriétaires de leur cabinet, c’est-à-dire, en tant qu’assistants, collaborateurs ou bien remplaçants.
Ces 3 statuts offrent aux praticiens titulaires de cabinets des solutions pour réduire leur temps de travail, afin de pallier un surcroit d’activité ou préparer leur retraite (dans le cas de l’assistanat et de la collaboration), et d’offrir une continuité de soins à leurs patients lorsqu’ils doivent s’absenter (dans le cas du remplacement).
Ces 3 modes d’exercice qui permettent au jeune kiné libéral de pratiquer et de prendre la mesure d’une patientèle sans engager de frais trop importants, sont souvent privilégiés en début de carrière.
Que vous soyez assistants, collaborateurs ou remplaçants, le métier de masseur-kinésithérapeute reste le même, bien sûr ; cependant, les conditions d’exercice sont différentes et génèrent parfois des confusions, pouvant mener à des situations conflictuelles. Voyons cela plus en détail.
Le Kiné libéral assistant
Les statuts d’assistants (parfois appelés aussi assistants-collaborateurs !) et de collaborateurs sont très souvent confondus. C’est pourquoi il est utile d’en préciser les contours.
À l’origine, le statut d’assistant a été créé pour pallier de manière temporaire un surcroît d’activité du kiné titulaire du cabinet. Si vous choisissez d’exercer sous le statut de kiné libéral assistant, sachez qu’il n’existe pas de lien de subordination entre vous et le masseur-kinésithérapeute titulaire ; en tant qu’assistant, vous êtes donc libre de réaliser votre mission comme vous le souhaitez (choix des actes à réaliser et des techniques à mettre en œuvre). En contrepartie bien sûr, vous êtes responsable de vos actes et devez avoir souscrit au préalable une assurance RCP.
En tant que kiné libéral assistant, vous exercez en votre nom propre et utilisez vos propres feuilles de soins. Vous percevez des honoraires sur les actes que vous pratiquez et versez une redevance au titulaire (en général un pourcentage des honoraires perçus) couvrant votre part des frais de fonctionnement du cabinet.
Contrairement à la collaboration, l’assistanat pâtit d’un manque de dispositions législatives. Les contrats d’assistanat libéral sont donc librement définis entre les parties si tant est qu’ils respectent les règles de déontologie de la profession. À vous de porter une attention particulière aux clauses du contrat que vous signez avec le titulaire.
Avec le temps, le caractère temporaire du statut de kiné libéral assistant s’est effacé, certains contrats d’assistanat pouvant même durer plusieurs années ! Si vous vous trouvez dans ce cas, il peut être judicieux d’étudier la possibilité de transformer votre contrat d’assistant-collaborateur en contrat de masseur-kinésithérapeute salarié.
Le kiné collaborateur libéral
Le contrat de collaboration libérale a pour objectif de soulager le masseur-kinésithérapeute titulaire du cabinet lors d’un surcroit d’activité lié à un accroissement de sa clientèle, de lui permettre de libérer du temps pour convenance personnelle ou encore de préparer sa succession. Si le kiné collaborateur libéral travaille au démarrage sur la clientèle du kiné titulaire, au fil du temps, il acquiert sa clientèle propre.
Lorsque vous optez pour le statut de kiné collaborateur libéral, vous exercez votre propre activité aux côtés du titulaire du cabinet, en toute autonomie : comme dans le cas de l’assistanat, vous n’entretenez en effet aucun lien de subordination avec lui. Vous devez donc également souscrire une assurance RCP. Enfin, vous percevez des honoraires sur les actes que vous réalisez et vous versez une redevance au titulaire couvrant l’utilisation des moyens d’exercice qu’il met à votre disposition ainsi que l’exploitation d’une partie de sa clientèle.
Le contrat de collaboration libérale est encadré juridiquement. Il est intéressant de noter qu’il ne comporte pas, par défaut, de clause de non-concurrence ou de non-réinstallation, puisque son objectif assumé est la reprise par le collaborateur de tout ou partie de la clientèle du titulaire du cabinet.
Il est prudent toutefois que vous prévoyiez dans votre contrat de collaboration une sortie (pour anticiper toute mésentente avec le kiné titulaire). Ainsi, quid de la patientèle dont vous vous êtes occupé, parfois pendant plusieurs années ? Quid du secteur géographique dans lequel vous pourrez vous installer par la suite ? Si, par défaut, l’article R.4321-100 du Code de déontologie protège à priori le titulaire d’un détournement de clientèle, il est important aussi que vous, en tant que collaborateur, vous preniez toutes les précautions contractuelles vous permettant de rebondir en cas de nécessité (vente de votre clientèle au titulaire, départ avec votre clientèle…)
Le kiné libéral remplaçant
Cette forme d’exercice consiste à remplacer temporairement le kinésithérapeute titulaire du cabinet qui est contraint de s’absenter (congé, maladie, formation…). Contrairement aux deux autres modes d’exercice qui peuvent se prolonger dans le temps, ici, le caractère temporaire est essentiel : s’il n’est pas respecté, les termes du contrat peuvent être déclarés caduques, le contrat de remplacement pouvant être interprété comme une gérance déguisée.
Le remplacement est assez souvent choisi par les jeunes praticiens lorsqu’ils débutent leur activité. En tant que kiné libéral remplaçant, vous participez à l’activité du cabinet sans vous soucier de son fonctionnement, ni en supporter les frais.
Vous exercez en lieu et place du kiné titulaire ; vous utilisez donc ses feuilles de soins sur lesquelles vous apposez votre nom et votre numéro d’identification. Contrairement à ce qui se passe pour le collaborateur ou l’assistant, c’est le kiné titulaire qui perçoit les honoraires sur les actes que vous pratiquez ; il vous reverse en contrepartie une rétrocession, dont le pourcentage est fixé dans le contrat de remplacement.
Il est à noter que votre contrat de remplacement contient naturellement une clause de non-concurrence et de non-réinstallation qui protège le titulaire du cabinet de tout détournement de patientèle. Si vous souhaitez vous installer après avoir exercé pendant un certain temps en tant que kiné libéral remplaçant, pensez à vérifier quelles zones géographiques vous sont proscrites et pendant quelles durées.
En résumé, comparatif entre les 3 modes d’exercice du kiné libéral
• Il exerce temporairement en lieu et place du masseur kinésithérapeute titulaire du cabinet.
• Les honoraires sont perçus par le titulaire remplacé.
• Il utilise les feuilles de maladie du titulaire du cabinet (en y indiquant son nom et son numéro d’identification).
• Il travaille sous le même régime que le titulaire.
• Il ne supporte pas les frais de fonctionnement du cabinet.
En résumé, comparatif entre les 3 modes d’exercice du kiné libéral
Assistant collaborateur | Collaborateur libéral | Remplaçant | |
Liberté d’exercice et pouvoir décisionnel | • Ils sont indépendants du titulaire (notamment quant au choix de leurs actes et techniques), ils n’entretiennent aucun lien de subordination avec lui.
• Ils exercent en leur nom propre. • Ils disposent de leurs propres feuilles de soins pré identifiées comme le titulaire du cabinet. • Ils reçoivent les honoraires qui leur sont dus.Ils sont responsables de leurs actes professionnels et doivent donc souscrire une assurance RCP. • Ils n’ont pas de pouvoir de décision quant à la gestion du cabinet (qui revient au(x) titulaire(s) et aux éventuels associés). • Ils participent aux frais de fonctionnement du cabinet. |
• Il exerce temporairement en lieu et place du masseur kinésithérapeute titulaire du cabinet.
• Les honoraires sont perçus par le titulaire remplacé. • Il utilise les feuilles de maladie du titulaire du cabinet (en y indiquant son nom et son numéro d’identification). • Il travaille sous le même régime que le titulaire. • Il ne supporte pas les frais de fonctionnement du cabinet. |
|
Redevance / Rétrocession | • Ils reversent une redevance au titulaire dont le montant est défini dans le contrat de collaboration ou d’assistanat.
• Il s’agit d’un pourcentage des honoraires perçus couvrant les frais générés par l’utilisation des locaux, les frais de fonctionnement du cabinet, l’utilisation du matériel et la mise à disposition de la patientèle (en général entre 30 et 40%). |
• Le masseur kinésithérapeute remplacé reverse au remplaçant une rétrocession.
• Le pourcentage de la rétrocession est fixé dans le contrat de remplacement (en général de l’ordre de 70%) |
|
Contrat | Contrat d’Assistant Libéral (CAL) signé par les 2 parties, non encadré juridiquement, dont le contenu peut varier, tout en incluant obligatoirement les aspects déontologiques propres à la profession, ainsi que :
• des clauses relatives à la durée du contrat, • le montant de la redevance, • et très souvent une clause de non-concurrence ou de non-réinstallation. |
Contrat de Collaboration Libérale (CCL) signé par les 2 parties, encadré juridiquement et comportant notamment :
• sa durée (CDD, CDI), • les modalités de rémunération (redevance), • les conditions d’exercice (jours et heures notamment où il peut développer sa propre patientèle), • les modalités de rupture de contrat, • l’obligation de renégocier les termes du contrat au bout de 4 ans. Le contrat de par la nature du statut de collaborateur, ne comporte pas, en principe, de clause de non-concurrence ou de non-réinstallation. |
Contrat de remplacement signé par les 2 parties et incluant :
• La durée du remplacement, • Le pourcentage de rétrocession, • Le mode de rémunération, • Une clause de non-concurrence ou de non-réinstallation de 2 ans, si la durée du remplacement est supérieure à 3 mois par an. |
Patientèle | • L’assistant exerce à la place du titulaire dont il suit la patientèle ; il ne peut donc pas développer sa propre patientèle. | • Le collaborateur libéral développe son activité aux côtés du titulaire du cabinet qui lui concède l’exploitation d’une partie de sa propre patientèle. | • Le remplaçant exerce à la place du titulaire et suit donc sa patientèle ; il ne peut développer sa propre patientèle. |
Plaque professionnelle | • Ils peuvent apposer leur plaque sur la façade de l’immeuble où se trouve le local professionnel | • Pas de plaque |
C’est en général après une période d’assistance, de collaboration ou de remplacement, que beaucoup de jeunes kinés libéraux décident de s’installer. S’ils s’installent en individuel, ils devront alors supporter seuls les frais de gestion et d’achat de la patientèle ; ils peuvent également décider de rejoindre une association de masseurs-kinésithérapeutes. D’autres choisissent de continuer à exercer leur activité en tant que remplaçant, préférant la variété de la mobilité à la stabilité.
Sources :
* Rapport « Démographie des Kinésithérapeutes, Septembre 2017, Conseil National de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes